Entreprise : où placer sa trésorerie ?
Face aux incertitudes économiques, certains chefs d’entreprise restreignent volontairement le versement de dividendes, dans le but de renforcer la solidité financière de leur entreprise en se constituant un matelas de sécurité. Ainsi, en cas de coup dur, l’entreprise aura les reins assez solides pour faire face à des difficultés économiques passagères.
D’autres entreprises ont également à souhait de placer leur excédent de trésorerie, mais avec d’autres objectifs. En effet, de nombreux entrepreneurs préfèrent investir via leur société plutôt qu’en nom propre, de façon à optimiser la fiscalité de leurs investissements. Nous allons expliquer plus bas les avantages d’investir via son entreprise dans une optique patrimoniale.
1. Sécuriser des excédents de trésorerie en cas de coup dur
Concernant les entreprises faisant le choix de sécuriser leur excédent de trésorerie en vue de renforcer leur solidité financière et de parer à toute éventualité, le choix de placements est limité. En l’espèce, le placement phare est le compte à terme (CAT).
Les comptes à terme sont des placements sans risque puisque le capital est garanti. La durée du placement est définie au moment de l’ouverture du CAT. C’est également à l’ouverture que le taux de rémunération est défini pour l’ensemble de la durée du placement. La rémunération des CAT est de l’ordre de 0,50 %. Ce taux peut être inférieur pour des placements à court terme (quelques mois) et supérieur pour des placements à long terme (plusieurs années).
La rémunération des comptes à terme est moins intéressante qu’il y a quelques années. La baisse du rendement des placements touche tous les placements sans risque.
En de cas de nécessité, l’argent investi sur un CAT est déblocable avant l’échéance du placement, mais cela entraîne une forte minoration du rendement convenu à la souscription (les conditions de rémunération en cas de sortie anticipée sont définies dans le contrat).
Le compte à terme est le meilleur placement de trésorerie pour les entrepreneurs ne souhaitant pas prendre de risque. Il y a encore quelques temps, certains établissements bancaires proposaient des comptes courants rémunérés, mais cela ne se trouve plus guère en raison de la baisse générale de la rémunération de l’épargne.
2. L’entreprise comme véhicule d’investissement patrimoniale
Quand il s’agit de développer son patrimoine personnel, les choses sont relativement simples pour les salariés : la rémunération est essentiellement constituée d’un salaire mensuel. En revanche, la situation se complexifie pour les entrepreneurs puisqu’ils peuvent contrôler la ventilation des flux de revenus, et choisir de récompenser les associés (les « actionnaires » perçoivent alors des dividendes) ou au contraire d’investir via leur société, ou plus souvent via une société holding.
En effet, certains entrepreneurs n’ont pas intérêt à investir à se distribuer de dividendes pour ensuite investir en nom propre. Tout d’abord, avant d’arriver dans la poche de l’entrepreneur, l’argent est taxé au titre de l’impôt sur le revenu, lequel peut être très élevé pour les contribuables dont les revenus s’inscrivent dans les tranches marginales d’imposition les plus fortes. Aussi, les très hauts salaires sont pénalisés par la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus (CEHR). Cette taxe n’a d’exceptionnel que le nom. Instaurée sous le gouvernement Fillon il y a presque une dizaine d’année, la CEHR touche toutes les personnes physiques dont les revenus professionnels et du patrimoine dépassent un certain montant (250 000 euros pour un célibataire).
Les plus-values réalisées par les personnes physiques sont imposées au prélèvement forfaitaire unique, dont le taux est de 30 %. Ce taux est moins intéressant que l’impôt sur les sociétés dont le taux devrait tomber à 25 % en 2022. Dans ce contexte, les entrepreneurs ont tout intérêt à gérer leur patrimoine via une holding à l’impôt sur les sociétés (IS), plutôt que d’investir en nom propre.
Le montage désormais très classique consiste à apporter les titres de sa société exploitante à une société mère (dite « holding ») vers laquelle l’entrepreneur fait remonter les dividendes. Ce montage prend le nom de régime mère-fille.
3. Quels sont les placements possibles via une société holding ?
D’un point de vue pratique, la holding permet d’investir sur des placements en tout point semblables à ceux accessibles aux personnes physiques.
En France, le placement financier le plus populaire est l’assurance vie. Ce dispositif est réservé aux personnes physiques. En revanche, le contrat de capitalisation est accessible aux personnes morales. En termes de supports d’investissement accessibles, les contrats de capitalisation sont en tout point semblables aux assurances vie multi-supports : l’investisseur peut arbitrer son capital sur des fonds euro et des supports en unités de compte. L’investisseur peut notamment investir sur des fonds d’investissement ou des supports immobiliers. Le contrat de capitalisation est une enveloppe capitalisante au sein de laquelle les gains sont très peu taxés (voire pas du tout) tant qu’ils sont réinvestis dans l’enveloppe. Il s’agit donc d’un dispositif adéquat pour développer son patrimoine.
Les holdings, en qualité de personne morale, peuvent également ouvrir un compte-titres ordinaire (CTO). Attention toutefois, en fonction des supports, le traitement fiscal du compte-titres peut prendre en compte les plus-values latentes (quelque chose qui n’existe pas pour les personnes physiques), ce qui est très pénalisant en comparaison avec le contrat de capitalisation.
Les holdings peuvent également détenir des sociétés civiles immobilières (SCI). Les SCI offrent un cadre intéressant pour investir dans l’immobilier locatif.
Enfin, la holding est un dispositif très intéressant pour prendre des participations dans d’autres sociétés non cotées (private equity, etc.).
L’investissement via une holding comporte des atouts fiscaux (une imposition à l’IS, pas d’impôt sur le revenu, etc.), mais pas seulement. La holding est également un outil pertinent pour transmettre son patrimoine à ses héritiers. Par ailleurs, les holdings conservant un rôle actif fort dans la gestion des sociétés exploitantes (on parle de « holding animatrice ») peuvent bénéficier sous condition du Pacte Dutreil, ce dispositif permet un abattement de 75 % sur l’assiette taxable lors des transmissions d’entreprise.