Les secteurs de l’aéronautique, la défense et l’espace prospèrent
L’association aérospatiale française Gifas a annoncé en mai que 2015 représentait une nouvelle année record, avec une croissance significative des exportations. Le président qui est également directeur de la stratégie et du marketing du groupe a déclaré que le secteur était en bonne santé, avec des commandes atteignant 78,3 milliards d’euros (88,1 milliards d’euros) et un carnet de commandes représentant désormais cinq années de production.
Une grande partie de ce chiffre est due à Airbus, dont le carnet de commandes s’élève à plus de 1 000 milliards d’euros (1 113 milliards d’euros) et qui produit depuis 10 ans. Le chiffre d’affaires en 2015 a atteint 58,3 milliards d’euros (74,4 milliards d’euros ou +8,5%) avec une demande prévue de 32 600 avions commerciaux au cours des 20 prochaines années, ce qui signifie que l’avenir est rose, selon le Gifas, qui estime que la moitié environ devrait être construite en Europe par Airbus et ses fournisseurs.
Cependant, le résultat le plus impressionnant de 2015 pour l’industrie aérospatiale française a été le retour en force du secteur de la défense. Le succès à l’export de l’avion de combat Dassault Rafale, vendu à l’Egypte et au Qatar, et l’accord en cours avec l’Inde ont eu un impact positif, avec un chiffre d’affaires à l’export de 16,2 milliards € (18,3 milliards d’euros) en 2015 (chiffres de la DGA, l’agence française des achats, incluant les industries aéronautique, maritime et militaire).
Les tensions internationales auront également un effet positif sur l’industrie en 2016 : Selon l’IHS, la France deviendra le deuxième pays exportateur de défense, devançant la Russie, grâce à son dernier succès, la vente de sous-marins à l’Australie (32 milliards d’euros, soit 36,2 milliards d’euros). Les entreprises françaises profitent des ventes à l’international dans le domaine de la défense, succès que l’on peut en partie attribuer au ministre de la Défense Jean-Yves Le Drian. Il s’est montré particulièrement habile à entretenir les contacts avec les gouvernements étrangers, tels que l’Egypte et le Qatar, qui se sont développés au cours de ses nombreuses années en tant que représentant en charge du secteur de la défense. Parallèlement, l’industrie française a développé une expertise en matière de transfert de technologie qui lui permet d’obtenir de gros contrats avec l’étranger. Thales et Dassault, par exemple, ont ouvert des filiales en Inde il y a des années pour aider à négocier un éventuel accord Rafale et pour apprendre à travailler avec le leader local de l’aérospatiale, HAL.
Risque du secteur français de l’aéronautique
Cependant, si le gouvernement français change avec l’élection présidentielle de 2017, cela pourrait avoir un impact négatif sur son industrie aérospatiale – si l’équipe en charge des exportations change complètement. Quoi qu’il en soit, Laurent Collet-Billon, responsable du service des achats, dont l’expertise et les connaissances ont été saluées par l’industrie, devrait quitter son poste début 2017, ce qui fait craindre qu’il ne laisse un vide dans ce poste influent.
L’environnement change aussi rapidement : L’Allemagne est sur le point de devenir un exportateur de défense et pourrait offrir une forte concurrence à la France sur certains marchés. Berlin a également décidé d’augmenter ses dépenses militaires au cours des cinq prochaines années et pousse sa propre industrie à développer de nouveaux produits et à pénétrer de nouveaux marchés.
L’industrie spatiale française a également enregistré de très bons chiffres en 2015, avec un chiffre d’affaires consolidé de 3,88 milliards d’euros (4,38 milliards d’euros). Selon les chiffres du Gifas, le secteur a contribué à hauteur de 1,8 milliard d’euros (3,7 milliards d’euros) aux exportations en 2014, et ce chiffre devrait continuer à croître ; 2015 a été une année record pour Arianespace (1,43 milliard d’euros / 1,62 milliard d’euros en 2015).
2016 sera une année de changement pour l’industrie, avec l’intégration de la supply chain Ariane dans les lanceurs Airbus Safran, donnant à la France le rôle central dans le développement et la fabrication d’Ariane 6. L’examen préliminaire de la conception d’Ariane 6 s’est terminé le 10 juin, a confirmé Alain Charmeau, directeur de programme, lors du dernier Salon aéronautique ILA de Berlin, le mois dernier.
La Commission européenne se prononcera prochainement sur l’acquisition du segment CNES d’Arianespace par ASL, ce qui permettra l’intégration définitive de l’entreprise. Quant à l’industrie spatiale, le directeur général de l’Agence spatiale européenne, Jan Woerner, a plaidé pour une préférence européenne dans les lanceurs, une position qui pourrait avoir un effet positif sur l’industrie.
Financement public
Les équipementiers leaders ont investi massivement dans la montée en puissance des grands programmes aérospatiaux. Les difficultés de Zodiac Aerospace – qui n’a pas été en mesure de fabriquer et de livrer des sièges d’avion assez rapidement l’année dernière, ce qui a entraîné des avertissements sur les bénéfices – sont le symbole d’une industrie qui a connu une croissance trop rapide pour faire face à des retards records.
Les petites entreprises aérospatiales françaises ont réalisé un chiffre d’affaires combiné de 20 milliards d’euros (22,6 milliards d’euros) en 2015, soit une légère augmentation par rapport à l’année précédente. Ces sociétés s’attendent à ce que l’année 2016 soit stable avant une forte montée en puissance au cours des prochaines années.
Les entreprises françaises bénéficient des meilleurs dispositifs d’investissement public, selon Pascal Veillat, PDG du groupe Arelis (fournisseur de l’aéronautique et de la défense du groupe Gifas-Coliét Aero PME). Cependant, les petites entreprises objectent aussi qu’elles ne sont pas considérées comme de véritables partenaires par les grandes entreprises, ce qui leur donne parfois seulement six mois de visibilité, tout en retardant les paiements de plus de 60 jours.
Dans l’ensemble, toutefois, le Gifas estime que la situation actuelle de l’industrie française lui confère une position forte, tirée par la production d’Airbus. Elle a pris des mesures pour renforcer la formation de personnel qualifié, 2 millions d’euros (2,26 millions d’euros) ayant été dépensés par le Gifas pour des cours de formation de techniciens. La numérisation de l’industrie aérospatiale a commencé, de plus en plus d’entreprises ayant recours aux essais virtuels, par exemple. Cela permet à des entreprises comme Thales de tester ses missiles 10 000 fois avant d’adapter les prototypes au modèle numérique.
Fabrication additive, ou impression 3D, un sujet clé
La fabrication additive, ou impression 3D, est également un sujet clé et sera utilisée par les lanceurs Airbus Safran pour de nombreux composants d’Ariane 6. De nombreux programmes et entreprises sont encouragés à investir grâce à des financements publics via la BPI (Banque Publique d’Investissement) et sa très active division aéronautique, qui participe déjà au financement et aux garanties de prêts de plus de 1 000 entreprises du secteur. Le Gifas espère que cela se poursuivra également sous le prochain gouvernement.